Résumés par intervenant > Colazzina Papon Lola

Au sein de l'environnement scolaire – élève, enseignant et école – la relation entre l'enseignant et l'élève fait partie des facteurs déterminants du parcours de l'élève (Fortin et al., 2011), influençant son décrochage ou sa persévérance scolaires. De plus, l'engagement de l'élève dans les apprentissages définit son activité et conditionne en retour celle de l'enseignant, ainsi que leurs interactions. En retour, ces dernières influencent l'engagement de l'élève dans les apprentissages (Pianta et al., 2008). Par conséquent, l'étude des interactions en contexte scolaire nécessite d'interroger la dyade enseignant-élève à travers les pratiques professionnelles enseignantes, notamment les gestes de l'enseignant (Jorro, 2006). 

Dans ce cadre, nous nous sommes tournés vers le concept d'embodiement (Cheville, 2006 ; Dourish, 2004) qui pose que toute (inter-)action est constituée d'un arrangement complexe entre plusieurs champs (les gestes, le corps, le langage) qui se déploient simultanément et s'influencent mutuellement (Gadille et Impedovo, 2020). Nous nous sommes également tournés vers le concept d'encorporation proposé et repris par Eschenauer (2014) pour traduire embodiement, dans un principe proche de l'activité incarnée et de l'énaction (Varela, 1996).

Cette communication a pour objectif de montrer comment les pratiques de l'enseignant et son rapport au corps, contraint par l'environnement physique de travail, favorisent l'engagement dans les apprentissages d'élèves en difficulté scolaire précoce, malgré l'éloignement entre leurs cultures scolaire et familiale.

Notre étude concerne des élèves de cours préparatoire (CP) qui fréquentent une école au cœur d'une zone géographique fortement marquée par des inégalités sociales et économiques. 

Nous avons choisi d'inscrire notre travail dans une approche interprétative fondée sur la Grounded Theory : la Gioa Methodology (Gioia et al., 2014). Les données ont été recueillies dans le cadre d'observations de séances d'enseignement, centrées sur les interactions enseignant/élève et à partir d'entretiens avec des enseignants et des élèves. C'est avec l'aide du logiciel d'analyse de données qualitatives (QSR NVivo) que nous avons procédé à un traitement en plusieurs temps (analyse descriptive, thématique puis modélisation).

Les résultats de notre étude montrent que l'engagement des élèves est fréquemment entravé par des éléments contextuels (environnement personnel, familial et social de l'élève, conditions objectives de travail). Ces freins semblent être contrebalancés par la professionnalité enseignante, qui s'appuie notamment sur la corporéité de l'enseignant dans une dimension interactionnelle voire sensible. Ces composantes constituent un réel levier qui aide l'élève à rester engagé durablement dans les apprentissages, malgré les ruptures et les obstacles qu'il rencontre.

Fort de ces conclusions, nous avons intégré un projet pluridisciplinaire qui s'intéresse à l'influence de l'environnement (socio-émotionnel, physique, architectural, culturel et sensoriel) de l'élève au sens large sur leur bien-être et celui des enseignants dans une école maternelle en éducation prioritaire. Il s'agit d'appréhender de façon holistique tous les facteurs qui participent au bien-être de l'enfant pour accompagner le développement de ses compétences scolaires.