Résumés par intervenant > Boulet Suzanne

La sensibilité perceptive élective dans l'apprentissage de l'art et du design : un levier vers une éducation inclusive ?
Suzanne Boulet  1, 2@  
1 : CREAT
2 : ARTES CLARE
Pierre Baumann

Cette thèse menée par théorie ancrée (Glaser & Strauss, 1967) s'articule en deux volets. Une première partie consiste en une quinzaine d'entretiens d'artistes professionnel·le·s de différentes disciplines (arts visuels, art sonore, danse, etc.) de la scène contemporaine. Elle aboutit à la définition d'une sensibilité perceptive élective et cerne le rôle qu'elle joue dans les processus de création des artistes interrogé·e·s.

La seconde partie du projet explore des pistes didactiques afin d'introduire cette sensibilité dans l'éducation à l'art et au design à l'école. Elles sont expérimentées auprès d'enfants de 6 à 11 ans (15 participant·e·s) et d'enseignant·e·s en formation à la Haute Ecole Pédagogique -Vaud (CH). Cette étape met en évidence de quelle manière ces dispositifs offrent un espace et une temporalité privilégié·e·s pour le vécu corporel et intime de l'apprenant·e au sein du cadre scolaire, autant que dans le contenu des apprentissages.

Comment la sensibilité perceptive élective permet de penser le phénomène de perception dans une approche écologique, c'est-à-dire dans une continuelle interaction du sujet avec son environnement ? En quoi son éducation permet de développer la réactivité de l'apprenant·e et sa capacité à choisir, c'est-à-dire à se positionner dans sa subjectivité au sein d'un environnement sociétal qui évolue de plus en plus rapidement ? Comment conduit-elle à des formats éducatifs inclusifs, c'est-à-dire qui prennent en considération la singularité de chaque apprenant·e, pour les disciplines artistiques ?

La sensibilité correspond à la fois à la faculté d'un individu à être affecté et son aptitude à y réagir (CNRTL). Dans le contexte des arts, cette définition remet en question la séparation entre expérience esthétique, à savoir réception de stimuli sensoriels, et expérience artistique, c'est-à-dire acte de création (Passeron, 1999). Elle suggère au contraire de les envisager comme deux faces d'un même phénomène.

Par ailleurs, la sensibilité décrite par les artistes interrogé·e·s se déploie dans le registre du sensoriel et ne passe pas par l'intermédiaire d'une représentation mentale. En ce sens, elle se rapproche de la conception de la perception élaborée par Gibson (1986), qui l'envisage dans un registre écologique d'échanges continuels entre l'individu et son milieu environnant. De la même manière, la sensibilité des artistes de l'étude se situe au seuil du « sentir » et du « réagir », sans étape cognitive transitoire ou préalable.

Finalement, la sensibilité qui traverse les processus de création des artistes interrogé·e·s apparaît comme un phénomène électif dans l'expérience sensible. L'artiste est touché·e par un agencement sensoriel particulier de son environnement qui résonne avec son monde intérieur. Elle se démarque, par exemple, d'une immersion sensorielle dans laquelle le sujet serait sensible à l'ensemble des stimuli sensoriels. Elle induit, au contraire, une focalisation de l'attention sur certains détails environnementaux. Dans le contexte d'une éducation à l'art et au design, elle permet d'embrasser les sensibilités de chaque apprenant·e dans leurs rencontres subjectives avec l'environnement perçu. Elle se révèle, ainsi, comme une perspective intéressante pour penser les enjeux d'inclusion en contexte scolaire.

 



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